Quand un enfant philosophe, le monde s’ouvre
- Linda Termine
- 11 févr.
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 3 avr.
L’autre jour, un enfant m’a demandé : « C’est quoi, être libre ? »
Six ans. Assis en tailleur, le regard curieux, l’air de dire que la réponse était sûrement quelque part, suspendue dans l’air entre nous deux.
J’ai souri. J’ai pris une seconde. Parce que cette question, elle traverse toute l’histoire de la philosophie. Parce qu’elle fait vaciller nos certitudes. Parce qu’elle nous concerne tous.
Alors j’ai fait ce que je fais toujours dans ces cas-là.
« Et toi, tu en penses quoi ? » Il a réfléchi un instant, les sourcils froncés.
Puis il a dit :
« Peut-être que c’est quand on peut décider… mais pas tout seul. »
Silence. Il venait, sans le savoir, de formuler ce que des siècles de philosophie ont tenté d’expliquer.
Être libre, ce n’est pas faire ce qu’on veut sans contrainte. Ce n’est pas l’isolement, l’individualisme.
C’est choisir. Mais dans un monde où d’autres existent, où d’autres comptent. Nous ne pensons pas seuls. Nous ne décidons pas seuls. Notre liberté s’invente avec les autres.
Les enfants sont des philosophes nés. Regardez-les. Écoutez-les. Ils ne prennent rien pour acquis. Ils questionnent tout.- « Pourquoi il faut être gentil si tout le monde ne l’est pas ? »- « Est-ce qu’on est encore la même personne quand on change ? »- « Est-ce que les étoiles s’éteignent vraiment si on les voit encore briller? »
Leur regard est neuf, leur pensée est libre. Et pourtant, que fait-on de ces questions ? Trop souvent, on les balaie d’un « tu comprendras plus tard », d’un « c’est compliqué ».
Mais non.
Ce n’est pas compliqué.
C’est essentiel.
Penser, c’est être libre, mais jamais seul.
Penser par soi-même ne signifie pas penser seul. Cela signifie exercer son jugement tout en restant ouvert aux autres. Un enfant qui philosophe apprend cela. Que la pensée est un mouvement. Qu’elle se nourrit du dialogue, de la rencontre. Qu’être libre, ce n’est pas choisir dans l’indifférence, mais comprendre que nos choix ont un poids, qu’ils s’inscrivent dans un monde où d’autres existent.
Dans une société où l’on cherche trop souvent à imposer des vérités toutes faites, où l’on réduit la pensée à des slogans, la philosophie est une respiration. Elle n’apprend pas quoi penser, mais comment penser. Et surtout, elle rappelle que penser seul, c’est risquer de se perdre. Mais penser ensemble, c’est construire quelque chose de plus grand.
Et si on ouvrait cet espace aux enfants ?
La philosophie n’est pas un luxe, encore moins une affaire d’élite. C’est une nécessité.
Faire des ateliers de philosophie avec eux, c’est leur donner un outil puissant : celui de ne pas subir le monde, mais de le comprendre. De ne pas se contenter de ce qui est dit, mais d’oser se poser des questions.
Alors, si on commençait ?
Si on prenait au sérieux leur regard sur le monde ?
Parce que peut-être que la clé du futur est là… Dans une pensée qui ne se contente pas d’obéir, mais qui cherche à comprendre.
Linda Termine alias Madame Philo est certifiée en animation philosophique et passionnée par la psychologie et les neurosciences. Elle se spécialise dans l’accompagnement du développement personnel des enfants et des adultes. Avec 13 ans d’expérience, elle intègre la philosophie pour enfants dans les écoles, en stimulant la réflexion critique et en renforçant les compétences sociales.
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